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1 Situation Géographique

L'île Maurice (en angl.: Mauritius) est située dans le sud-ouest de l'océan Indien, à quelque 800 km à l'est de la grande île de Madagascar et à 220 km à l'est de l'île de La Réunion. Ainsi, d'ouest en est, l'île de La Réunion, l'île Maurice (et ses îlots de Agaléga, Saint-Brandon, Cargados Carajos et Chagos Archipelago) ainsi que l'île Rodrigues forment l'archipel des Mascareignes, du nom du navigateur portugais Pedro Mascarenhas qui les explora. Toutes les îles de l'archipel des Mascareignes appartiennent à la république de Maurice, sauf l'île de La Réunion qui constitue un département français d'outre-mer (DOM). Toutefois, l'île Maurice est beaucoup moins éloignée de La Réunion (200 km) que de l'île Rodrigues (600 km). La superficie de la république de Maurice est de 1865 km2, et elle atteint un total de 2040 km2 en incluant ses dépendances.

À 394 km au nord-est de l'île Maurice se trouvent les Cargados Carajos qui regroupent 22 îles. L'une d'elles, l'île Saint-Brandon, possède un hôpital et une station météorologique; seuls quelques pêcheurs engagés par une compagnie mauricienne y séjournent périodiquement. Plus loin, se profilent les îles Agalega dont la population est de 300 habitants et, au sud des Maldives, Diego Garcia abritant une base militaire américaine, mais dont la souveraineté est réclamée par le gouvernement mauricien. Tout au nord de l'archipel se trouve l'îlot Tromelin qui est demeuré sous contrôle français. La république de Maurice (en angl. Republic of Mauritius), autrefois colonie française (1715-1810) puis britannique, est un État indépendant depuis 1968.

La quasi-totalité des habitants de cet État résident dans l'île Maurice, puisqu'on ne dénombre que 35 000 habitants dans l'île Rodrigues qui couvre une centaine de kilomètres carrés; les autres petites îles ne sont pas régulièrement habitées.

L'agglomération de la capitale, Port-Louis, nommée ainsi en souvenir de Louis XV, compte près de 300 000 habitants, soit plus de 40 % de la population totale de l'île Maurice. Les principales villes demeurent Port-Louis, la capitale, puis Rose Hill, Beau-Bassin, Quatre-Bornes, Vacoas, Phoenix, Cure-Pipe (ces villes se touchent et forment une seule agglomération) et Mahébourg où se situe l'aéroport.

2 Données démolinguistiques

La population de la république de Maurice s'élève à 1,2 million d'habitants et est composée de différentes ethnies: 68% de la population est d'origine indienne (dont 51 % de religion hindouiste , des ruraux et 17 % sont de religion musulmane, des urbains); ils sont suivis des Métis (27%), des Chinois (3 %) et des Européens (2 %), surtout des francophones (env. 37 000), et aussi un certain nombre d'anglophones (env. 3000). En somme, deux habitants sur trois sont d'origine indienne; ce sont les descendants de travailleurs venus dans les plantations, après l'abolition de l'esclavage (1835) par la Grande-Bretagne. Les autres Mauriciens sont des métis (ou «créoles») descendant des premiers esclaves et des colons français, puis des Chinois (arrivés après les Indiens) fort actifs aujourd'hui dans les commerces d'alimentation.

Bien que la langue officielle de la république de Maurice soit l'anglais, la majorité de la population, qu'elle soit d'origine africaine, métisse ou indienne, parle le créole mauricien dans une proportion de 55 %; en créole, on l'appelle le morisyen, mais en français on parle du créole franco-mauricien, une conséquence de la colonisation française qui a duré un siècle. Il faut préciser que 18 % des Mauriciens de toutes ethnies parlent aussi ce créole comme langue secondaire pour un total de 800 000 locuteurs, c'est-à-dire 73 % de la population. C'est pourquoi le français, en raison de ses similitudes linguistiques avec le créole mauricien, reste la langue européenne la mieux comprise par l'ensemble des Mauriciens, et ce, d'autant plus qu'il est parlé comme langue maternelle par 37 000 Franco-Mauriciens, contre 3000 pour l'anglais. Soulignons, par ailleurs, que le créole mauricien, ainsi que celui de l'île Rodrigues (appelé le créole de Rodrigues), est plus près du créole martiniquais et du créole guadeloupéen des Antilles que celui de La Réunion parlé juste à 200 km plus loin dans l'océan Indien.

Quant à la population d'origine indienne, de nombreux locuteurs ont conservé leur langue d'origine: ils parlent le bhojpouri (30 %), l'ourdou (5,8 %) ou le tamoul (2 %); les deux premières sont des langues indo-iraniennes alors que la dernière fait partie des langues dravidiennes. Pour ce qui est des 35 000 Chinois, outre le créole, ils parlent des langues sino-tibétaines, soit le chinois hakka, soit le chinois wu, soit le chinois mandarin.

Il faut retenir que l'anglais et le français constituent pour tous les Mauriciens – à l'exception des Franco-Mauriciens et des Anglo-Mauriciens – des langues étrangères. Tout le monde parle le créole mauricien ou une langue indienne (ou chinoise), sauf les quelques «Métropolitains» britanniques ou français. Soulignons que la connaissance du français et de l'anglais est variable dans la population, elle dépend grandement du degré d'instruction des individus. Il est plus facile pour la majorité des Mauriciens d'apprendre le français que l'anglais en raison des affinités linguistiques avec le créole et en raison également du prestige dont jouit le français au point de vue culturel.

L'anglais, pour sa part, souffre de son isolement linguistique par rapport au créole. Rares sont les Mauriciens qui affirment savoir plus l'anglais que le français, à l'exception des Indo-Mauriciens et des Sino-Mauriciens toujours plus familiers avec l'anglais qu'avec le français. Mais on aurait tort de croire que ces groupes ethniques ignorent le français: ils le connaissent moins, c'est tout.

L'anglais est la langue de l'État, mais les fonctionnaires connaissent plus le français que l'anglais... Dans les faits, le français est nettement la deuxième langue (après le créole) des habitants de l'île Maurice et l'anglais, la troisième, et ce, même pour les Indo-Mauriciens et les Sino-Mauriciens. C'est probablement cette situation qui porte certains à dire que «tout le monde parle en français, mais tous écrivent en anglais».

Enfin, les Mauriciens pratiquent la religion hindouiste dans une proportion de 52 %; les catholiques comptent pour 26 %, les musulmans pour 16,6 %, les protestants pour 2 %. Les diverses autres religions forment 3 % de la population.

3 Données historiques

Une carte de 1153, dressée par le célèbre géographe arabe, Al Sharif el-Edrissi, montre que les trois îles des Mascareignes portaient les noms de Dina Arobi (île Maurice), Dina Margabin (île de La Réunion) et Dina Moraze (île Rodrigues). Mais les Arabes ne restèrent pas longtemps aux Mascareignes. Ce navigateur portugais: Pedro de Mascarenhas découvrit également l'île Bourbon (aujourd'hui l'île de La Réunion) en 1505; Diégo Fernandez Pereira découvrit en 1507 l'île Maurice et l'île Rodrigues, mais c'est Don Diégo Rodriguez qui donna son nom à cette dernière en 1528. Pour les Portugais, les îles de l'archipel des Mascareignes servaient simplement de relais et de centre de ravitaillement sur la route des Indes. Ils n'occupèrent jamais les Mascareignes.

3.1 La période hollandaise (1598-1710)

C'est en 1516 que les premiers Hollandais débarquèrent à l'île Maurice. Ils ne purent vraiment coloniser l'île à ce moment-là, car les esclaves amenés d'Afrique s'étaient enfuis dans les montagnes dès leur arrivée: ce furent les premiers esclaves marrons de Maurice. Afin de rentabiliser leur nouvel établissement de l'île Maurice, les Hollandais développèrent vers 1641 le commerce des esclaves en provenance de Madagascar. Cependant, peu d'esclaves malgaches furent acheminés vers Maurice durant l'occupation hollandaise.

En 1598, une escadrille hollandaise, sous les ordres de l'amiral Wybrand Van Warwyck, aborda l'île Maurice qui fut nommée Mauritius en l'honneur du prince Mauritius Van Nassau de Hollande. Une petite colonie de colons venus des établissements hollandais du cap de Bonne-Espérance s'installèrent avec des esclaves d'origine africaine. Au lieu de faire fructifier leur nouvelle colonie, les Hollandais se contentèrent de piller la faune (d'où l'extinction, entre autres, du célèbre dodo, une sorte de gros pigeon qui aurait abandonné ses ailes et aurait pris du poids en l'absence de prédateurs) et la flore (causant en particulier l'épuisement du bois d'ébène). En revanche, les Hollandais introduisirent la canne à sucre et importèrent des cerfs de Java, mais ils quittèrent l'île avec leurs esclaves en 1710 à la suite de graves sécheresses et de terribles ravages des cyclones.

3.2 La colonisation française (1715-1810)

Abandonnée par les Hollandais, l'île Maurice devint une possession française en septembre 1715 lorsque Guillaume Dufresne d'Arsel l'aborda, en prit possession et la nomma «île de France». Les premiers colons français arrivèrent en 1721 au moment où l'île était administrée par la Compagnie des Indes orientales (de 1722 à 1767). On sait que, pour concurrencer les autres pays européens, Louis XIV et Colbert avaient créé la Compagnie des Indes orientales en 1664. Afin d'attirer des capitaux, ils lui avaient accordé un monopole commercial dans l'océan Indien pendant 50 ans et lui avaient cédé la souveraineté sur Madagascar ainsi que sur les îles voisines et les futurs territoires à conquérir. En 1725, les Français annexèrent l'île Rodrigues qui fut occupée en permanence à partir de 1735. Rappelons, par ailleurs, que l'île Bourbon (appelée aujourd'hui La Réunion) avait reçu ses premiers colons en 1665 (rappel de la carte 1). Dès le début de la colonisation française à l'île de France (Maurice), surtout entre 1721 et 1735, quelques centaines (entre 400 et 600) d'esclaves en provenance du Sénégal et de la Guinée arrivèrent à l'île. Depuis le 28 août 1670, à la demande du ministre Colbert, le Conseil d'État du royaume avait officialisé la pratique de l'esclavage en France. Aux Antilles, l'esclavage avait vite assuré la prospérité économique de ces régions. En mars 1685, était proclamé le fameux Code noir, une ordonnance de Louis XIV destinée à réglementer et à tempérer le régime de l'esclavage, et précisant les devoirs des maîtres et des esclaves. On le sait, ce Code Noir, qui resta en vigueur dans toutes les Antilles et en Guyane française jusqu'en 1848 (date de l'abolition définitive de l'esclavage par la France), fut rarement respecté, les exploitants n'en ayant fait bien souvent qu'à leur tête.

En 1723, le célèbre Code Noir de 1685 fut adapté à l'usage des Mascareignes et les lettres patentes de Louis XV, en forme d'édit, furent enregistrées à l'île Bourbon (La Réunion) dans la ville de Saint-Paul, le 18 septembre 1724, par le Conseil supérieur de Bourbon. Ce nouveau Code Noir adapté à la situation de l'île Bourbon (La Réunion) et de l'île de France (Maurice) favorisa, dès 1725, l'arrivée de milliers d'esclaves qui venaient en majorité de l'île de Madagascar et de l'Afrique orientale pour y cultiver le café et les plantes à épices. Cette main-d'œuvre abondante paraissait nécessaire pour permettre à la Compagnie des Indes orientales de poursuivre l'expansion économique de l'océan Indien.

C'est en 1735 que l'île de France (Maurice) commença son véritable développement avec l'arrivée de son plus célèbre gouverneur: Bertrand-François Mahé de Labourdonnais, nommé par la Compagnies des Indes orientales; il dirigea la colonie de 1735 à 1746 et fonda la ville de Port-Louis.

Mahé de Labourdonnais fit prospérer l'île de France (Maurice) avec la fondation de plusieurs villes dont Port-Louis, la construction d'édifices administratifs, de magasins, d'entrepôts et de casernes militaires. Il favorisa l'exploitation des forêts pour le bois d'oeuvre (et des chantiers navals), la production de la canne de sucre ainsi que la culture du café, de l'indigo et du poivre. Port-Louis devint le chef-lieu des établissements français de toute la région. Pendant que l'île de France (Maurice) ne comptait que 1000 habitants, l'île Bourbon (La Réunion) en comptait 8000 (dont 6000 esclaves). À partir de 1735, le gouverneur Mahé de Labourdonnais fit peupler l'île Rodrigues, avec comme mission le ramassage de tortues et leur chargement sur les bateaux de la Compagnie des Indes orientales. Rodrigues connut son véritable peuplement à partir de 1760. Une garnison française y résida même en permanence; l'île comprenait alors des colons blancs et des esclaves. En 1767, sous l'administration de l'intendant Pierre Poivre (1767-1772), on recensait à Rodrigues encore seulement 32 habitants: 4 Français, 2 Blancs créoles de l'île Bourbon (La Réunion), 16 Malabars libres et 10 esclaves.

Grâce à Pierre Poivre, le «commissaire ordonnateur» et intendant général des îles de France (Maurice) et de Bourbon (La Réunion), l'archipel des Mascareignes devint une colonie prospère, organisée et enviée par les Britanniques. Poivre avait introduit l'imprimerie à l'île de France en 1768 (l'Imprimerie royale de Port-Louis) et, comme il était botaniste et membre de plusieurs académies de sciences, il avait acclimaté sur les îles de l'archipel quantité d'épices (dont, bien sûr, le poivre, mais aussi la girofle, la muscade, la cannelle, etc.) et des dizaines d'espèces végétales; il avait également favorisé la culture des arbres fruitiers et fut même l'auteur des premières lois sur la protection de la nature; c'est à lui que les Mauriciens doivent le célèbre jardin de Pamplemousses, qui abrite des nénuphars géants et plus de 60 variétés de palmiers. De plus, Poivre assainit le climat moral et social des Mascareignes en améliorant le sort des esclaves dans tout l'archipel. La population augmenta à l'île de France (Maurice): de près d'un millier d'habitants en 1735, elle atteignait en 1767 les 20 000 habitants, dont 15 000 esclaves.

Les historiens ont d'ailleurs établi que la période d'émergence du créole mauricien se situait entre 1721 et 1769. C'est ce qui expliquerait que le créole mauricien d'aujourd'hui contient encore des mots d'origine sénégalaise provenant en réalité de la langue wolof. Ce créole contient en outre de grandes quantités de mots malgaches et comoriens, car un grand nombre d'esclaves furent importés aussi de l'île de Madagascar et des Comores.

Le 27 juillet 1793, la Convention de Paris proclama l'interdiction de la traite des esclaves et, quelques mois plus tard, le 4 février 1794, celle de l'esclavage. Le décret prescrivait «l'abolition immédiate», mais ne prévoyait aucune disposition sur le dédommagement des propriétaires ou sur l'avenir des «populations libérées». L'Assemblée coloniale de l'île de France (Maurice) se prononça contre ce décret et réclama avec insistance à la Convention sa suppression pure et simple. Les colons

de l'île de France (Maurice) et ceux de Bourbon (La Réunion) n'obtinrent qu'un sursis et décidèrent alors de ne pas appliquer le décret d'abolition.Le 20 mai 1802, le premier consul de la République, Napoléon Bonaparte, rétablit partiellement l'esclavage. Les intérêts économiques avaient eu raison des idéaux révolutionnaires de liberté et d'égalité. Les colons de l'archipel des Mascareignes, qui n'avaient pas appliqué le décret de la Convention nationale, furent évidemment rassurés. Toutes les réformes de la Révolution furent également supprimées, au grand soulagement de tous (sauf pour les esclaves!), y compris la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen adoptée en 1789 par l'Assemblée nationale.

En 1803, le général Decaen envoyé par Napoléon débarqua aux Mascareignes pour imposer le nouveau régime politique. La colonie fut aussitôt prise en mains par les administrateurs nommés par Napoléon, qui dirigèrent les affaires de l'île Bourbon (devenue entre-temps l'île Bonaparte) à partir de l'île de France. Mais les rivalités franco-britanniques, déjà virulentes aux Antilles, se propagèrent dans l'océan Indien, et ce, d'autant plus que la colonie française de l'océan Indien ne pouvait que susciter la convoitise des Britanniques. Comme cette colonie s'étendait sur une grande surface dans l'océan Indien, c'est-à-dire tout l'archipel des Mascareignes (île de France, île Bonaparte et île Rodrigues) et tout l'archipel des Seychelles situé plus au nord, elle risquait de nuire considérablement au commerce anglais. De plus, pendant les guerres napoléoniennes, l'île de France (Maurice) et l'île Bonaparte (La Réunion) étaient devenues le rendez-vous des corsaires français qui organisaient des raids fructueux contre les navires commerciaux britanniques. Il était temps pour les Britanniques de mettre fin à l'hégémonie française dans cette partie de l'océan Indien.

En 1809, les troupes britanniques commencèrent par occuper l'île Rodrigues, ce qui devait constituer la première étape dans la conquête de l'archipel des Mascareignes et de l'archipel des Seychelles. En effet, les Britanniques avaient rassemblé leurs 10 000 soldats à Rodrigues avant de prendre d'assaut l'île de France (Maurice) et l'île Bonaparte (La Réunion) en décembre 1810; ils occuperont l'archipel des Seychelles en 1812. Le dernier gouverneur français de l'île de France, le général Decaen, dut capituler au nom de la France, ses forces étant jugées trop inférieures en nombre. À la fin de l'occupation française, en 1810, la population s'élevait à 73 000 habitants et était constituée à 80 % d'esclaves originaires de l'Afrique orientale pour la plupart, notamment du Mozambique et de Madagascar.

Selon les clauses du traité de Paris de 1814, les Français perdirent définitivement l'archipel des Seychelles et l'archipel des Mascareignes à l'exception de la seule île Bonaparte (La Réunion), rebaptisée Isle of Bourbon par les Anglais, qui fut rétrocédée à la France. Dans l'ancienne colonie de l'île de France (Maurice), il ne subsistait de la présence française que le français et le créole (à base lexicale française). Après seulement deux générations, la langue véhiculaire issue des esclaves africains ou malgaches et des Français était devenue la langue maternelle des descendants d'esclaves: le créole mauricien.

3.3 La colonisation britannique (1810-1968)

Après le traité de Paris, l'île de France reprit son nom précédent de Mauritius. Dans l'acte de capitulation de 1810, l'article 8 spécifiait que les colons pouvaient conserver «leurs religion, lois et coutumes». Bien que le traité de Paris de 1814 ne reprenait pas réellement cette formulation, le nouveau gouvernement anglais, dirigé par le gouverneur Sir Robert Farquhar, admit que l'usage de la langue française constituait l'une de ces «coutumes» que les colons pouvaient maintenir. En fait, les Britanniques consentirent à ce que les habitants de Maurice et de Rodrigues continuent d'utiliser leur langue, leur religion, leur code civil, leurs traditions et leurs douanes. Peu nombreux et n'ayant pas l'intention d'habiter l'archipel, les Anglais étaient prêts à faire des concessions. Des changements sociaux et économiques se firent sentir aussitôt. Les fonctionnaires français furent remplacés par des fonctionnaires anglais au sein de l'administration et toute l'économie se développa dorénavant dans le cadre de l'Empire britannique. Beaucoup de Franco-Mauriciens blancs, notamment des grands propriétaires fonciers et des hommes d'affaires, décidèrent de rester à l'île et poursuivirent l'exploitation de la canne à sucre avec leur main-d'oeuvre d'esclaves africains et malgaches. Ces Blancs constituèrent le groupe des Franco-Mauriciens qui continuaient de parler la langue française. Appuyés par le clergé catholique, ils opposèrent une résistance opiniâtre aux velléités gouvernementales de mainmise linguistique. Quant à leurs esclaves, ils furent maintenus dans leur infériorité sociale et purent continuer à utiliser le créole mauricien. De toute façon, comme les Anglais ne cherchaient pas à s'installer en grand nombre à l'île Maurice, les autochtones continuèrent de parler essentiellement français et créole.

En 1832, le gouvernement colonial anglais imposa une première politique linguistique: la langue anglaise devint obligatoire pour les Mauriciens lors de toute communication avec les autorités britanniques. L'année suivante, l'anglais devint l'unique langue de l'Administration en servant de critère d'embauche dans les services gouvernementaux.

Le changement le plus important survint en 1835 lors de l'abolition de l'esclavage dans toutes les colonies britanniques. L'importation d'esclaves avait cessé depuis 1833 à Maurice alors que la population s'élevait à quelque 100 000 habitants dont plus de 80 000 esclaves. Devant les besoins de main-d'oeuvre pour faire fonctionner les plantations sucrières, l'Administration anglaise décida de recourir à des travailleurs indiens rétribués à contrat; c'est en 1829 qu'eurent lieu les premières tentatives pour importer des travailleurs agricoles de l'Inde. Entre 1835 et 1865, plus de 200 000 immigrants indiens et chinois affluèrent à l'île Maurice et changèrent radicalement la composition ethnique des habitants. Les immigrants indiens, qui étaient de religion hindouiste ou musulmane, formèrent rapidement la majorité des travailleurs agricoles. Quant aux Chinois, ils s'ajoutèrent ultérieurement et devinrent de petits commerçants.

Les nouveaux immigrants asiatiques ne changèrent à peu près rien au rôle social des langues à l'île Maurice. Les Franco-Mauriciens réussirent à confiner les nouveaux arrivants dans une infériorité sociale; les Indo-Mauriciens adoptèrent alors le créole comme langue véhiculaire, qui s'enrichit de mots anglais ou indiens, eux-mêmes créolisés.

Par ailleurs, en 1841, l'enseignement de l'anglais devint obligatoire au primaire dans toutes les écoles en plus du français. Les Franco-Mauriciens protestèrent du fait que les «pauvres négrillons» furent «forcés de crier toute la journée comme des perroquets des mots barbares», mais rien n'y fit. Enfin, en 1845, l'anglais devint la langue de la Cour suprême; toutefois, les tribunaux inférieurs, qui statuaient encore à partir du code de Napoléon, continuèrent à utiliser le français. Au début du XXe siècle, la population mauricienne atteignait les 371 000 habitants et la majorité de la population était déjà constituée d'Indiens. En 1870, l'île perdit sa position stratégique à l'occasion de l'ouverture du canal de Suez, et cet événement eut pour effet d'écarter l'île de Maurice de la route des Indes et d'aggraver la situation socio-économique. Jusqu'en 1903, l'île Maurice et les Seychelles furent administrées comme une seule colonie par la Grande-Bretagne. Puis, l'île Maurice affirma de plus en plus son autonomie face à la couronne britannique. À partir des années trente, des mouvements populaires en faveur de la démocratisation commencèrent à se manifester et aboutirent graduellement au droit de suffrage universel et aux élections législatives de 1948. Des mouvements nationalistes se formèrent et, suite à un référendum, l'île Maurice devint un État indépendant le 12 mars 1968; il fut doté d'un système parlementaire de type britannique. Depuis son indépendance, Maurice est un pays souverain qui fait partie du Commonwealth britannique et, depuis le Ve Sommet d'octobre 1993, la république de Maurice fait également partie de la Francophonie.

4 La politique linguistique

Le statut officiel des langues n'est pas défini dans la Constitution de Maurice et, par le fait même, reste ambigu. En effet, l'article 49 de la Constitution de 1992 ne traite que de la langue du Parlement:

Article 49

La langue officielle de l'Assemblée est l'anglais, mais tout membre peut s'adresser à la Présidence en français.

D'après cette disposition constitutionnelle, l'anglais est la seule langue de travail de l'Assemblée législative. Dans la pratique mauricienne cependant, l'anglais est considéré comme la langue officielle écrite, le français et le créole, comme les langues officielles parlées. D'ailleurs, l'article 33 précise ainsi les conditions d'éligibilité des membres de l'Assemblée:

Article 33

Sous réserve des dispositions de l'article 34, une personne n'est éligible comme membre de l'Assemblée que si elle satisfait aux conditions suivantes: [...]

(d) être capable de parler et – à moins qu'elle en soit incapable pour cause de cécité ou pour toute autre cause physique –

de lire l'anglais avec un degré de compétence suffisant pour lui permettre de prendre une part active aux délibérations de l'Assemblée.

À l'article 46, on lit même comment sont intitulées les lois (en anglais dans le texte):

Article 46

[...]

(5) Toutes les lois adoptées par le Parlement sont intitulées: «Acts of Parliament» et la formule de promulgation est «Enacted by the Parliament of Mauritius».

Ainsi, d'après l'article 49, le français est juste considéré comme une langue acceptée ou tolérée à l'Assemblée. Cependant, les députés peuvent aussi s'exprimer en créole. Il en résulte, dans les faits, que l'anglais, le français et le créole sont utilisés au Parlement. Seuls les députés d'origine créole s'expriment en français ou en créole (surtout), tandis que les députés indo-mauriciens s'expriment presque exclusivement en anglais; les faits démontrent que l'anglais est plus souvent utilisé que le français et le créole à la fois; mais le créole est plus fréquent que le français. Les lois adoptées avant 1814 le sont en français ainsi que tous les modifications à ces mêmes lois. Celles adoptées après 1814 sont rédigées exclusivement en anglais. Autrement dit, les lois modernes sont en anglais, les lois anciennes et leurs modifications contemporaines, en français. De façon générale, les politiciens s'expriment en créole auprès de leurs électeurs, en anglais lorsqu'ils s'adressent à toute la population, en une langue indienne — surtout le bhojpouri et l'ourdou — lorsqu'un politicien indo-mauricien s'adresse aux membres de sa communauté.

5 Les langues de la justice

D'après l'article 5 de la Constitution, on pourrait comprendre que trois langues sont permises dans les tribunaux:

Article 5

Quiconque est arrêté ou détenu doit être informé aussi vite qu'il sera raisonnablement possible, et dans une langue qu'il comprend, des raisons de son arrestation ou de sa détention.

La loi autorise les Mauriciens à s'exprimer dans l'une des trois langues officielles de la justice: l'anglais, le français et le créole. En réalité, le français reste la langue la plus utilisée dans les tribunaux; il est suivi du créole et enfin de l'anglais. Les juges rendent généralement leurs sentences en français, moins souvent en anglais et rarement en créole.

Dans toute procédure écrite, la sentence peut être rédigée en anglais ou en français. Mais les cours d'appel, notamment la Cour suprême du pays, n'utilisent que l'anglais (depuis 1845). Les Franco-Mauriciens et la plupart des créolophones s'expriment en français dans les cours de justice alors que les Anglo-Mauriciens, les Indo-Mauriciens et les Sino-Mauriciens s'expriment en anglais.

6 Les langues de l'Administration

Les fonctionnaires utilisent généralement le français ou le créole comme langue de travail. Lorsqu'ils s'adressent oralement aux citoyens, ils le font normalement en créole ou en français, mais ils passeront à l'anglais si cela est nécessaire (surtout à l'intention des Indo-Mauriciens et des Sino-Mauriciens). Les documents officiels du gouvernement sont généralement rédigés en anglais seulement.

Dans les administrations municipales, les hôpitaux ou autres établissements de santé, les langues utilisées sont toujours le créole et le français. On parlera anglais seulement si cela paraît nécessaire. Bref, l'usage spontané est d'employer le créole, puis le français ensuite. L'anglais est réservé aux demandes expresses, notamment avec les citoyens d'origine indienne ou chinoise.

En ce qui concerne la toponymie, les noms de lieu sont très majoritairement d'origine française, mais un certain nombre de ceux-ci ont été jadis traduits par l'Administration britannique; d'où les inscriptions toponymiques bilingues à l'île Maurice. Le bilinguisme français-anglais est presque la règle sur les plaques odonymiques (rues), mais l'ensemble de la signalisation routière est en anglais.

Ainsi, dans l'administration, on constate que l'anglais est peut-être la langue de l'État, mais pas celle de la population qui, d'ailleurs, est généralement plus favorable au français qu'à l'anglais.

7 Les langues dans l'enseignement

L'emploi des langues dans l'enseignement primaire est réglé par l'Education Ordinance de 1957, mais les Mauriciens en ont décidé autrement. Ainsi, à la maternelle, toutes les langues sont permises (incluant les langues indiennes), mais il n'existe que des écoles maternelles en créole et en français.

Au primaire, toutes les langues sont autorisées, mais dans la pratique tout le premier cycle du primaire ne se fait qu'en créole et en français. Au second cycle, l'anglais est obligatoire, mais les écoles continuent généralement de ne dispenser les cours qu'en français et en créole.

Par contre, au secondaire, l'anglais devient une langue d'enseignement courante, statut qu'il partage avec le français et le créole. Cette prédilection pour le français à l'école de la part des parents créolisants s'explique par le fait que le créole est très apparenté au français, ce qui contribue à sa compréhension. Par contre, en ce qui a trait à l'anglais, en raison de l'absence de liens de parenté, la connaissance de celui-ci reste assez rudimentaire. L'anglais devient très important au secondaire en raison surtout des examens de sortie qui sont en anglais. Quant aux langues indiennes, elles sont très largement négligées par les principaux intéressés eux-mêmes. Ils jugent la connaissance de leur langue ancestrale peu utile dans le contexte mauricien; la plupart croient même que la connaissance du français demeure préférable aux langues indiennes, une fois, bien sûr, l'anglais acquis.

Il faut comprendre que la loi prescrit l'enseignement de l'anglais dès le primaire, mais ce sont les parents et les comités de parents qui décident du dosage des langues utilisées. Dans la plupart des écoles, l'anglais est balayé sous le tapis au profit du français, les parents préférant conserver l'anglais pour le secondaire, une fois acquis les rudiments du français oral et écrit. Cette pratique n'a jamais été normalisée par le gouvernement qui donne sûrement ainsi son accord tacite.

Il en est de même à l'université: on enseigne dans l'une ou l'autre des trois langues, selon la classe sociale du professeur. Ainsi, à la fin de ses études secondaires, l'élève mauricien est généralement trilingue. Pour ce qui est des langues indiennes comme le bhojpouri, le tamoul, l'ourdou, etc., elles ont été introduites au primaire à partir de 1940 comme matière facultative pour les élèves indo-mauriciens à la place des leçons de catéchisme des élèves chrétiens (et parlant créole). Lorsque les élèves suivent ces cours dits de «langues ancestrales», ils doivent apprendre l'alphabet latin qu'ils ne connaissent pas, ainsi que, selon le cas, l'alphabet dévanâgari ou tamoul ou bhojpouri, etc., mais ils doivent aussi apprendre le français et l'anglais. Cette situation devient tellement lourde pour les Indo-Mauriciens que plusieurs abandonnent et se contentent du français et de l'anglais.

8 La vie économique et l'affichage

L'unilinguisme anglais dans l'affichage n'existe que pour les édifices gouver­nementaux et il n'est pas fréquent, le bilinguisme anglais-français étant généralement la règle. Quelques ministères (comme les Postes) et les banques adoptent même l'unilinguisme français.

Les langues de la PUBLICITÉ commerciale sont l'anglais (normalement), le français (moins fréquent) et le créole (plutôt exceptionnel). Le publicitaire utilise la langue de son choix et tout dépend du groupe à qui on s'adresse, mais également du caractère du produit et du lieu, ainsi que du véhicule publicitaire. On retrouve presque de tout : des affiches bilingues anglaises-françaises ou françaises-créoles, des affiches unilingues françaises ou créoles, mais peu d'affiches unilingues anglaises. Cette situation n'est pas surprenante quand on sait que l'anglais est la langue maternelle de moins de 3000 personnes à l'île Maurice. En schématisant, on pourrait dire que Maurice est un cas intéressant de bilinguisme dans l'affichage. Les panneaux routiers sont toujours en anglais, mais les panneaux «privés» (du genre «maison à vendre», «chambres à louer», les enseignes des boutiques comme les «tabagies», etc.) sont en français. Parfois, les deux langues sont utilisées, mais pas pour exprimer les mêmes messages, sauf pour les panneaux destinés aux touristes.

En réalité, le français, le créole et l'anglais se sont réparti, de façon fonctionnelle, le domaine de la publicité commerciale. Le français, la langue la plus fréquente, sert surtout à publiciser les événements cul­turels, les annonces reli­gieuses de l'Église catholique, les produits de luxe, les biens de consommation des petites et moyennes entreprises, les films (français) à l'affiche dans les cinémas. Bien qu'il soit moins répandu, l'affichage en créole est utilisé pour les messages politiques, pour les informations ayant trait à la sécurité publique, pour les produits de consommation de base, pour les slogans dif­fusés par certaines institutions religieuses et d'autres organismes non gouvernementaux. Quant à l'anglais (encore moins fréquent), il se limite à la publicité des produits technologiques (mécanique,électronique, informatique), à celle des boîtes de nuit ainsi qu'aux messages destinés aux touristes. Par ailleurs, les phénomènes d'emprunt sont fréquents, de même que l'alternance linguistique (mélange des langues). Bref, la non-réglementation dans le domaine de l'affichage reflète le multilinguisme de l'île Maurice, mais aussi le caractère fonctionnel de chacune des langues dans l'affichage.

Quant aux MÉDIAS ÉCRITS, ils sont massivement francophones. Mentionnons les titres suivants: Plus Dimanche, Business Publications Ltd, Financial Year Book, Business Mag, Magazine d'économie et de politique, The Chinese Daily News, L'Express, Le Mauricien (trilingue), Le Militant Magazine, Le Socialiste, Star (français et anglais) et La Vie catholique. Pour ce qui est des médias électroniques, ils sont en français, en anglais et en créole mauricien. Le réseau MBC (Mauritius Broadcasting Corporation) est en anglais, mais TV5 et RFO-Réunion sont en français. Depuis quelques années, la télévision de langue anglaise supplante le français en raison des émissions et des films américains. Les radios privées diffusent en créole mauricien.

Étant donné que les Mauriciens d'origine indienne sont relativement nombreux, on peut être surpris de l'absence de leurs langues dans la politique linguistique de ce pays. C'est que la perception des langues indiennes est claire pour la plupart des Mauriciens, autant de la part des créolisants que des Indo-Mauriciens eux-mêmes: ces langues servent seulement d'instrument d'identité communautaire, et elles vont bientôt disparaître de l'île. Dans ces conditions, on voit mal pourquoi le gouvernement s'en mêlerait et tenterait de les sauvegarder. Les pratiques actuelles ne semblent pas brimer les Mauriciens qui trouvent avantageux d'utiliser leur langue maternelle (créole ou langues indiennes) quand bon leur semble et de recourir à deux langues supra-communautaires très standardisées dont la connaissance ne connaît pas de frontière ethnique. En attendant, pour tous les Mauriciens, le trilinguisme créole-français-anglais est perçu comme allant de soi et ne saurait être remis en question.

D'aprés : http://www.tlfq.ulaval.ca/axl/index.shtml

Histoire et Géographie vus par la presse de 1998

A l'occasion de la célébration du trentenaire de l'indépendance

L'île Maurice fait partie des Mascareignes et se situe au sud-ouest de l'Océan Indien, entre les latitudes 19''50 et 20''51 sud et les longitudes 57''18 et 57''48 est. De forme elliptique et occupant une superficie de 1865 kilomètres carrés, l'île a longtemps été considérée comme l'étoile et la clé de l'Océan Indien. Elle a pour voisins, à l'ouest, l'île de la Réunion à 231 kilomètres et Madagascar à 1083 kilomètres, elle est placée à 1800 kilomètres de la côte africaine, à 4000 kilomètres de l'Inde et au nord à 5800 kilomètres de la côte ouest de l'Australie. L'Ile Maurice accéda à l'indépendance le 12 mars 1968 et la République fut proclamée le 12 mars 1992. Le taux de change est la Roupie (Rs = 100 cents). La langue Officielle est l'Anglais, la population s'élève à environ 1,2 millions et le système politique est copié sur le régime parlementaire de type Britannique.

Ses points les plus éloignés s'étendent du nord au sud de Cap Malheureux à Souillac (58 kilomètres), et d'ouest en est de Flic en Flac à Grande Rivière Sud Est (47 kilomètres) et 330 Kilomètres de côtes. Formée depuis environ 70 millions d'années l'île est d'origine volcanique, mais toute activité volcanique y aurait cessé il y a un million d'années. Ses masses rocheuses sont de basalte de deux périodes très distinctes, séparées par une période assez longue d'érosion. Les premières séries volcaniques sont responsables du relief montagneux alors que les plus récentes ont donné lieu à la création des étendues de terre agricole.

CLIMAT

Loin de tout continent, L'île Maurice bénéficie d'un climat essentiellement maritime : tropical en été, sub-tropical en hiver. Durant la plus grande partie de l'année, les vents soufflent du sud-est, particulièrement entre mai et octobre. En été, des vents plus doux, parfois interrompus par des régimes cycloniques prévalent sur l'île.

La répartition des pluies tient compte de l'élévation des vents du sud-est, causée par les montagnes. La pluie varie ainsi selon les régions : elle atteint seulement 89 et 100 millimètres au sud-ouest, la région la plus sèche de l'île, mais peut dépasser 190 millimètres à l'Est alors que sur les haut-plateaux, dans la région curepipienne, il n'est pas rare que la pluie enregistrée soit de 300 millimètres. La saison des grandes pluies se situe entre janvier et mai.

L'île Maurice peut être divisée en trois régions à humidité variable :
(a) Une région très humide ; avec plus de 254 millimètres de pluie ;
(b) Une région humide, où l'on enregistre entre 127 et 254 millimètres ;
(c) Enfin une région sous-humide avec moins de 127 millimètres. L'humidité de l'air varie de 60% en octobre à 68% en février sur la côte, alors qu'elle atteint 87% à l'intérieur des terres, pouvant même dépasser 90% pendant les mois les plus pluvieux. La durée moyenne de soleil est de 8 heures par jour et la température varie de 17 à 24 degrés centigrades sur les hauts plateaux.

LES MONTAGNES

On distingue, à Maurice, essentiellement trois chaînes de montagnes :

(a) Celle de Moka qui part de la Nouvelle Découverte pour finir à Montagne Ory.
(b) Celle de la Rivière Noire qui s'étend de la Montagne du Rempart au Morne.
(c) Et celle de Grand Port qui part de la localité jusqu'à Grande Rivière Sud-Est.La pointe la plus élevée est celle du Piton de la Rivière Noire (828 mètres), alors que deux autres montagnes dépassent les 800 mètres: Le Pieter Both (823 mètres), Le Pouce (812 mètres) et la Montagne du Rempart (772 mètres).

Les cratères subsistant de la formation de l'île sont le Trou aux Cerfs à Curepipe et Trou Kanaka pour les plus connus .

LES RIVIERES

L'île est traversée par un grand nombre de rivières, dont la plus longue est la Grande Rivière Sud Est (GRSE), qui prend sa source à Piton du Milieu pour se déverser dans la mer 34 kilomètres plus loin.

Les principales rivières du pays sont :

Au nord, la Grande Rivière Nord Ouest (GRNO), longue de 22 kilomètres qui prend sa source à Butte Chaumont, près de Curepipe. A l'ouest, la Grande Rivière Noire qui prend sa source près de la Baie de Tamarin et s'y jette; la Rivière du Tamarin, longue de 14.4 kilomètres et dont la source se trouve près de Mare aux Vacoas. Dans le sud, la Rivière du Poste, qui ferme le district de Savanne, est longue de 23 kilomètres et prend sa source à Grand Bassin ; la Rivière des Anguilles prend sa source également à Grand Bassin, la Rivière du Cap qui sépare le district de Savanne de celui de Rivière Noire et produit la plus belle cascade de l'île, celle de Chamarel (91,5 mètres). A Grand Port, la Rivière la Chaux longue de 22 kilomètres qui part de Fressanges pour se jeter à Mahébourg, la Rivière des Créoles qui part de Midlands et finit à Mahébourg également après un parcours de 20 kilomètres. A l'Est, outre la Grande Rivière Sud Est (GRSE), qui est la plus longue de l'île, la Rivière Poste de Flacq, 18 kilomètres, se jette à Flacq et La Rivière Sèche, 11 kilomètres, dont la source est à Montagne Fayence. Enfin dans le Nord, La Rivière Rempart dont la source est à Nouvelle Découverte et qui est longue de 16 kilomètres, la Rivière des Pamplemousses, 17 kilomètres qui part de la plaine St Cloud et se jette dans la Baie aux Tortues. On compte aussi plusieurs cascades dans l'île, la plus haute étant celle de Tamarin (ou Sept Cascades) avec 293 mètres de chute suivie de la Cascade des Galets (153 mètres). Les Lacs Grand Bassin, Bassin Blanc et Mare aux Vacoas sont des lacs naturels. Mare aux Vacoas situé à 550 mètres d'altitude dans une des régions les plus pluvieuses de l'île est le plus grand. D'autres lacs artificiels sont ceux de La Ferme et La Nicolière, alors qu'on compte plusieurs mares.

LES FORÊTS

Les forêts occupent environ 6% de la surface de l'île et sont constituées pour 80% de pins (Pinus Ellioti). Situées sur les terres de la Couronne, elles sont propriétés de l'Etat,à l‘exception de 560 hectares de forêts appartenant à des particuliers et 2800 hectares de forêts ont été déclarés réserves naturelles

LA FAUNE

La faune indigène a, dans une large mesure, été détruite, le spécimen le mieux connu étant le dodo, par ailleurs il ne reste que 9 espèces d'origine, dont les pigeons.

Le Dodo

Oiseau lent, disgracieux, à bec de pélican et à corps de gros canard dodu, ne pouvant pas voler car il avait des ailes très courtes mais qui lui permettaient de se défendre contre les attaques de ses rares ennemis. Le Dodo ou Dronte appelé 'Raphus cuclatus' dans le jargon scientifique, faisait partie de la faune de l'île. Selon la légende, l'île comptait un grand nombre de ces Drontes dont la lourdeur en fit des cibles faciles pour les chasseurs hollandais.
D'autre part, le Dodo pondait son unique oeuf de taille considérable dans l'herbe à même le sol. En route vers l'Inde et l'Indonésie, les marins n'hésitaient pas de chasser le dodo afin d'agrémenter leur alimentation trop monotone, même si la chair était coriace et sans saveur.En 1854, le naturaliste britannique Georges Clark découvrit des ossements de Dodo à Mare-Aux-Songes, dans la région de Plaisance, le squelette reconstitué peut être vu au musée d'histoire naturelle de Port Louis.
On retrouve dans l'île plusieurs types de mammifères : le singe, introduit de Ceylan par les Portugais en 1528 ; le cerf introduit par les Hollandais de Batavia en 1639 ; le sanglier (ou cochon marron ) ; la chèvre sauvage, introduite de l'Inde de même que le lièvre ; le lapin introduit de Java en 1639 en même temps que le cerf ; Le rat, la mangouste (introduite en 1900) ; le « tandrac » (Porc-épic), la chauve-souris (dont on connaît quatre espèces). Parmi les reptiles, la tortue introduite de Seychelles, le lézard (dont il existe une dizaine d'espèces), le caméléon introduit en 1865, les couleuvres et serpents (inoffensifs).

LES INSECTES

On compte à Maurice 3000 espèces d'insectes : coléoptères, lépidoptères (papillon), hémiptères (poux) ; hyménoptères (abeilles, guêpes) et isoptères ainsi qu'une soixantaine d'espèces d'araignées, 200 espèces de crustacés, 3000 espèces de mollusques (dont 2400 marines).

LA FLORE


Les légumes
Voici les plus connus : le chouchou, le giraumon (citrouille ou potiron), le pâtisson, le manioc, la pomme de terre, la bringelle (l'aubergine) et encore les embrevades (ou embravattes à la Réunion), pipengaille, fruit à pain, embérique, choux, margoze, arouille, lalo,vouëme, haricot vert, patolle, comcombres, calebasse sans oublier la pomme d'amour (tomate).
– Les brèdes : épinards, oseille, bettes, chouchou, martin, cresson, petsaï (genre de laitue), songe, moutarde, etc.
– Le palmiste : sous ce nom, il faut comprendre « cœur de palmier ».


Les fruits
Voici les plus savoureux : mangue (nombreuses variétés), litchi, papaye, goyave, carambole (de forme oblongue, vert-jaune avec des arêtes), atte (avec une écorce verte à gros grains ovales et une chair délicieuse), cœur de bœuf, grenadine, fruit de Cythère, tamarin, corrosol, avocat, jamrosa, bibasse (nèfle), longanes, jamalaque, jack-fruit (gros fruit de forme ovale), coco rouge, jujube, pommes jacquot, bilimbi, jamblons. Et tous les classiques : melon, pastèque, banane (goûtez à la « gingeli », hmm !), mandarine, citron vert et ananas.


Les épices
Classiques : muscade, clou de girofle, cardamome, cumin, massala (graine de coriandre), gingembre, cannelle, poivre vert, piment, caripoulé, le vargon, le « quatre épices ».

Massala : Le massala est composé de graines du cotomili ou coriandre. On utilise aussi les feuilles de cette petite plante (appelées persil chinois). Les graines sont écrasées pour être utilisées dans la poudre de curry.


Caripoulé : Le caripoulé est un arbuste à feuilles à saveur aromatique épicée s'utilisant dans les préparation des curry et aussi dans les fricassées pour en relever la saveur.

Quatre épices : Arbuste à feuilles très aromatiques où l'on retrouve les saveurs de quatre épices différentes : cannelle, girofle, muscade et poivre.

Tamarin : Le tamarin est une pâte faite avec le fruit du tamarinier. On l'utilise dans certains mets, dont le curry; sa saveur est acide. On consomme également le tamarin sous forme de sirop.


A Maurice, on retrouve dans tous les menus de restaurants des plats indiens, créoles, chinois et européens.
Quelques plats usuels :
– Le riz : On trouve de nombreuses variétés : des gros grains, des petits, des longs. L'un des plus prisés est le basmati.
– Le vindaye : originaire de l'ouest de l'Inde, se prépare avec moutarde, vinaigre, oignons, épices... et se sert froid.
– Le rougail : spécialité créole, venant de la Réunion. À Maurice, il est surtout à base de tomates, oignons, ail, gingembre et d'épices.
– Le chutney (ou chatini) : originaire de l'Inde. Mélange d'épices écrasées, ail, gingembre, piment, vinaigre, etc.
– Le carry (ou curry) et le cari : typiquement indien, le carry n'est pas une seule épice mais un ensemble d'épices. Le cari est le nom d'un plat qui contient du carry.
– Les daubes : tout ce qui mijote pendant longtemps, accompagné d'une sauce riche et épicée.
- Les achards: Légumes : carottes, choux, choux-fleurs, haricot (les légumes finement hachés, sont séchés et mélangés a une pâte composée de safran, piment, moutarde et huile). On en fait aussi avec des mangues, bilimbis, jack, goyave et citrons.
– Briani (ou byriani) : plat musulman traditionnel du nord de l'Inde.
– Le cerf : La chair étant un peu dure, on le prépare souvent en sauce.
– Les poissons : grillés, en cari, en vindaye ou même fumés.
– Les crustacés : crabes, bigorneaux, « tectecs », crevettes et crevettes géantes.
– Samoussas, dholl puri, beignets : « en-cas ». Les dholl puri sont des sortes de crêpes extra-fines à peine cuites, très souples, que l'on remplit de légumes et de sauce. Les samoussas sont des feuilletés fourrés à base de pommes de terre ou de viande, légèrement épicés, puis frits.
Boissons alcoolisées :
– Plusieurs rhums sont distillés dans l'île. Le Green Island est un des plus prisés.
– Les Mauriciens préfèrent le whisky au « ti-punch » ou au punch coco!
– Phœnix, Blue Marlin ou Stella : trois bières locales, douces et agréables.
– Le vin : des raisins d'Afrique du Sud sont vinifiés à Maurice. Essayez-en un verre, juste par curiosité.
Boissons chaudes
– Le café s'avère plutôt bon.
- Le thé est assez fort et la plupart du temps vanillé.


Les districts de l'île

Maurice est, depuis 1786, divisée en neufs districts, dont les limites ont très peu varié au fil des siècles. Ce sont ceux de : (1)Rivière Noire, (2)Flacq, (3)Grand Port, (4)Moka, (5)Pamplemousses, (6)Plaine Wilhems, (7) Port Louis, (8)Rivière du Rempart, (9)Savanne. Ces districts étaient connus, précédemment, sous le nom de « quartiers ». En août 1768, l'île était divisée en onze « quartiers ». Cinq ans après, ce nombre était ramené à 8 : Rivière Noire, Plaine Wilhems, Port Louis, Moka, Pamplemousses, Flacq, Rivière du Rempart et Port Bourbon « Grand Port ». Un neuvième district, celui de Savanne était ajouté à la liste en 1786. l'île Rodrigues forme le 10ème district.

carte districts

LES ÎLOTS

On trouve, au large de Maurice, de nombreux îlots qui forment le territoire mauricien. Certains d'entre eux, loués à bail pour de longues périodes, sont occupés par des particuliers. Les plus connus des îlots sont :

Dans la région Port-Louisienne :
L'île aux Tonneliers et L'îlot Barkly

Au large de Rivière Noire :
L'île aux Bénitiers (45 hectares) l'île Fourneau (11 hectares), l'îlot Fortier (5 hectares), et l'île du Morne.

Dans la région de Grand Port :
L'île de la Passe (2 hectares), l'île aux Fouquets, l'île aux Vaquois, l'île Lafond, l'île Brocus, l'île des Deux Cocos, l'île du Hangar, l'île aux Aigrettes, Mouchoir Rouge, l'îlot Marianne.

Dans la région de Flacq :
L'île aux Cerfs , l'île de l'Est, l'île aux Fous, l'île aux lièvres.

Dans la région de Rivière du Rempart :
L'île d'Ambre, l'îlot Matapan, l'îlot Bernache, l'îlot du Mort.

Dans la région du nord :
L'île Plate, Le Coin de Mire, l'île aux Serpents, l'île Ronde, l'île au Colombier.

De nombreuses autres îles de l'Océan Indien font partie du territoire mauricien. La plus grande est l'île Rodrigues à 600 kilomètres au nord-est de Maurice. Le territoire national comprend également le groupe Cargados Carajos, communément appelé Saint Brandon, à 394 kilomètres au nord nord-est de l'Ile, Agaléga à 950 kilomètres au nord de Maurice, l'Archipel des Chagos, que revendique le gouvernement mauricien, à environ 2000 kilomètres au nord-est de Maurice et l'île Tromelin au nord-est de Madagascar (qui est toutefois également revendiquée par la France et Madagascar).

L'HISTOIRE

L'île Maurice a connu quatre périodes de colonisations (deux hollandaises, une française et une anglaise) avant de devenir, en 1968, indépendante de la Grande Bretagne, dans le cadre du Commonwealth.

Visitée plusieurs siècles auparavant par des navigateurs arabes, phoeniciens ou dravidiens, l'île Maurice n'a commencé à intéresser les Européens qu'à partir du début du 16ème siècle. La date exacte de la découverte de l'île par les Portugais a longtemps été matière à controverse. Certains historiens la place en 1511 en attribuant la découverte à Don Pedro de Mascarenhas, d'autres au 28 décembre 1511 et au navigateur Domingo Fernandez, mais dans un ouvrage publié en 1979, et après de longues recherches, le Dr A. North-Coombes révélait que c'est en fait le navigateur portugais Diego Dias qui découvrit l'île en juillet 1500 avant de découvrir un mois plus tard l'île de la Réunion. D'abord nommée « Ilha do cirna » par les Portugais, l'île intéressa peu ces derniers malgré le fait qu'elle fut 75 ans durant possession portugaise. Aucun établissement n'y fut établi et Maurice ne fut utilisée par les Portugais que comme un centre de ravitaillement ou lieu de refuge. Ils introduisirent du bétail dans l'île, mais ne laissèrent aucune habitation et on sait très peu de choses de leur passage dans la région.

Première occupation

La première tentative sérieuse de colonisation fut faite par les Hollandais à partir de 1638. Quarante ans plus tôt, une flottille de navires hollandais (L'Amsterdam de Zélande, le Guelderland, l'Utrecht et la Frize) placée sous le commandement du Vice-Amiral Wybrandt Van Warwick poussée par une tempête était parvenue en vue de l'île, le 17 septembre 1598. Après avoir jeté l'ancre le 19 au large de Ferney (au Sud-est) les hollandais avaient entrepris d‘explorer l'île. Découvrant que celle-ci offrait un potentiel certain, Wybrandt Warwick en prit formellement possession au nom de la Hollande et la rebaptise « Maurice » en l'honneur du Stathouder (gouverneur) Maurice de Nassau. Après plusieurs missions exploratoires, un premier groupe de 25 colons, soldats et esclaves, placé sous le commandement de Cornelius Simons Gooyer était envoyé dans l'île pour y marquer une présence permanente sur la côte Est. Quelques habitations et fortifications furent construites, certaines régions défrichées et les ressources de l'île exploitées pour le compte de la Compagnie Hollandaise des Indes, mais d‘insurmontables difficultés (mauvaises conditions climatiques, invasions de rats, manque d'intérêt de la part de la compagnie) eurent raison de la persévérance des premiers colons qui, après 20 ans d‘une expérience marquée par l'échec, repartaient découragés.

D'autres colons prenaient la relève, six ans plus tard, en 1664, pour une deuxième tentative de colonisation qui dura 42 ans, mais ne fut guère plus encourageante.

Quelques constructions furent érigées (dont il reste, au Vieux Grand Port, quelques ruines), les routes furent améliorées, d'autres régions explorées, l'élevage intensifié. Malgré un effort plus soutenu que lors de la première période de colonisation, les Hollandais ne purent rentabiliser leur entreprise et en 1710 ils repartaient, cette fois définitivement, laissant pourtant derrière eux la culture de la cannes à sucre, introduite des Indes Orientales, qui allait déterminer le destin de l'île Maurice.

La dominance française

Cinq ans après, en septembre 1715, les Français (qui avaient déjà montré leur intérêt pour les îles du sud-ouest de l'Océan Indien en colonisant Madagascar et l'île Bourbon (aujourd'hui Réunion) prirent rapidement la relève des Hollandais. Guillaume Dufresne, capitaine du « Chasseur », déparqua le 20 septembre au Port Nord-Ouest (Port Louis) et prit solennellement possession de l'île au nom du roi de France, la rebaptisant « île de France ». En guerre contre la Grande Bretagne, soucieuse de se doter de ports bien abrités et de compenser ses pertes dans les guerres contre l'Angleterre et l'Autriche, la France tenta aussitôt de tirer parti de sa nouvelle acquisition. Des esclaves furent amenés de Madagascar et d'Afrique pour le développement de l'agriculture, le système de communications internes fut rapidement développé, la capitale transférée de Grand Port à Port Louis, le commerce développé. De généreuses concessions furent octroyées aux colons de l'île Bourbon en vue de les attirer à l'isle de France.

La colonisation française peut se diviser en deux périodes : la première sous l'administration royale, de 1765 à 1810. Dès mars 1723, un « Conseil Provincial » fut institué.

En 1731, De Maupin décida le transfert de la capitale à Port Louis. L'Administration de la Compagnie des Indes sera particulièrement marquée par le passage dans l'île du gouverneur Mahé de Labourdonnais (1735 – 1746) qui convertit Port Louis en importante base navale. Il fit bâtir plusieurs immeubles publics, casernes, docks et canaux. Labourdonnais établit un « Conseil Supérieur », encouragea l'agriculture et la culture de la canne à sucre en particulier. 2500 colons de Bourbon s'établirent à Maurice, qui prospéra pour devenir un important centre de commerce dans cette partie du monde. En juillet 1748, les Anglais tentèrent sans succès de conquérir l'île. Confronté à d'importantes difficultés, la Compagnie des Indes rendit l'île au roi de France en 1765. Le 4 juillet 1768, débarquait à l'isle de France, Bernardin de St Pierre, qui allait immortaliser Paul et Virginie dans le roman le plus célèbre ayant pour toile de fond l'île Maurice. La même année, l'île était divisée en «quartiers», qui allaient devenir les « districts » actuels. En 1773 est publié le premier journal de l'île, qui sera suivi en deux siècles de six cents autres.

La révolution

Le 18 juin 1790, les colons apprennent la nouvelle de la révolution en France. Une « assemblée coloniale » est mise sur pied, une nouvelle constitution introduite, des élus au parlement français désignés, des comités locaux institués. Bonaparte les dissoudra tous en 1803.

La menace anglaise

Entre temps, l'Angleterre confirma peu à peu sa supériorité sur les mers. Le 27 août 1810, des troupes anglaises tentent d'envahir l'île de France et sont repoussés lors de la Bataille de Grand Port qui fut la plus grande victoire navale des guerres de l'empire. Mais le 29 novembre une nouvelle expédition anglaise partie de Rodrigues débarque au nord de l'île et marche sur Port Louis. Le gouverneur Decaen, pour éviter un bain de sang, capitule. Le traité de capitulation reconnaît aux habitants de l'île le droit de conserver leurs coutumes, traditions, langue et religion. En 1814 par le traité de Paris, l'isle de France est cédée à l'Angleterre par la France alors que l'île de la Réunion demeure Française.

L'administration britannique

L'administration britannique sera marquée par la tentative des nouveaux maîtres de l'île de se concilier les faveurs de la population locale. Un ordre d'abolition de l'esclavage est publié dès le 14 janvier 1813 (mais il ne sera appliqué qu'à partir de 1835). Les termes de l'accord de capitulation sont scrupuleusement respectés. Un conseil de gouvernement consultatif est institué. La culture de la canne à sucre est rapidement développée, l'île de France (entre-temps rebaptisée « Mauritius ») devant devenir fournisseur de cette matière première pour l'Angleterre, selon le rôle qui lui est imparti dans l'Empire par le pouvoir colonial.


L'immigration Indienne

Avec l'abolition formelle de l'esclavage en 1835, contre l'avis des colons, commence une importante immigration de travailleurs indiens : 450 000 travailleurs « engagés » viendront à Maurice en 30 ans, constituant dès les années 1860 une majorité de la population et entraînant une progression constante dans la production du sucre qui atteindra 100 000 tonnes en 1855 et 250 000 tonnes en 1925 . Le rôle du sucre deviendra alors dominant dans l'économie de l'île.

La démocratie régionale est introduite en 1849 avec les premières élections municipales à Port Louis. Le chemin de fer est introduit en 1862, la roupie en 1877 (monnaie toujours en cours dans l'île), et en 1884 les premières usines fonctionnent à l‘électricité. En 1886, après une longue bataille pour une réforme constitutionnelle destinée à accorder aux Mauriciens un rôle accru dans les affaires de l'île, une nouvelle constitution est introduite, prévoyant l'élection de 10 députés et des élections tous les 5 ans. Le droit de vote demeure pourtant limité. Conservateurs (Oligarches) et libéraux s'affrontent aux élections de 1886 à 1921, les Conservateurs gardant la haute main sur le conseil législatif, alors que se crée entre les couches défavorisées de la population une unité politique marquée par des demandes d'extension de suffrage et d'amélioration des conditions de vie de plus pauvres. Des commissions d'enquêtes royales successives iront dans ce sens. En 1921, un mouvement visant à la rétrocession de l'île Maurice à la France mené par le Dr Maurice Curé est écrasé aux élections alors que la Grande Bretagne confirme son intention de garder Maurice dans l'Empire. Le même Curé lancera, en 1936, le Parti Travailliste, qui de succès en succès, aux élections de 1948, 1953, 1959, 1963 et 1967 obtiendra l'indépendance de Maurice le 12 Mars 1968. Entre-temps sur le plan social, on assiste à la démocratisation de l'enseignement, à la montée des aspirations, au développement de l'infrastructure de l'île, à une forte poussée démographique qui portera la population de moins de 400 000 en 1831 à plus de 700 000 habitants au moment de l'Indépendance. Dans le même temps, la vie politique mauricienne se caractérise par une grande sophistication alors qu'est consolidée la démocratie. Une action intense marquée par des grèves dans les années 30 entraîne la reconnaissance des droits des travailleurs, la réforme des lois du travail, la célébration en 1938 pour la première fois à Maurice de la Fête du Travail.

La montée vers l'indépendance ou la vie politique contemporaine

Majoritaire au Conseil Législatif dès 1959, le Parti Travailliste sous la direction de Sir Seewoosagur Ramgoolam œuvre en faveur d'une plus grande autonomie et éventuellement de l'Indépendance.
Regroupant l'essentiel de l'électorat rural (que lui dispute un temps l'Indépendant Forward Block, de Sookdeo Bissoondoyal ) le Parti Travailliste remporte les élections législatives de 1963 et insiste pour l'indépendance complète.

Le Parti Mauricien, animé par Jules Koenig et Gaëtan Duval et largement soutenu par les minorités ethniques, s'y oppose. Mais la Grande-Bretagne, se désengageant de ses responsabilités coloniales à travers le monde, prépare déjà la voie vers l'indépendance de Maurice. Le pouvoir colonial pousse, en 1964, à la formation d'un gouvernement d'unité nationale mené par le Parti Travailliste dont le leader, Sir Seewoosagur Ramgoolamdevient premier ministre d'un gouvernement pratiquement autonome. Le Gouverneur britannique assume toujours la présidence du Conseil des ministres mais y siègent également le Parti Mauricien Social Démocrate (quatre dirigeants font leur entrée au gouvernement), l'Indépendant Forward Block de Sookdeo Bissoondoyal et le Comité d'Action Musulman de Sir Abdool Razack Mohamed. Des conférences constitutionnelles ont lieu à Londres, préparant des élections déterminantes en 1967 sur l'avenir constitutionnel du pays. Le Parti Mauricien Social Démocrate quitte le gouvernement en 1965, passe le leadership à Gaëtan Duval et se prépare à combattre l'indépendance. Face à la fulgurante ascension du Parti Mauricien Social Démocrate qui, d'une élection à l'autre passera de 16 à 44% des suffrages populaires, et soucieux de voir le pays accéder à l'indépendance, Sir Seewoosagur Ramgoolam conclut un accord de gouvernement avec l'Indépendant Forward Block et le Comité d'Action Musulman et remporte haut la main les élections/référendum d'août 1967. Le Parlement mauricien vote alors une motion réclamant l'indépendance de Maurice. La Grande Bretagne y accède, après avoir incorporé dans la charte constitutionnelle mauricienne de solides garanties pour le maintien de la démocratie et la défense des minorités. Un exode massif s'ensuivra pourtant dans les rangs de la population de l'île. Des echauffourées raciales éclatent à Port Louis quelques semaines avant l'indépendance, opposant les musulmans aux créoles. L'INDEPENDANCE

Le drapeau mauricien est hissé pour la première fois au Champ de Mars à Port Louis, le 12 mars 1968. Sir Seewoosagur Ramgoolam et Gaëtan Duval réconcilient le pays dans un gouvernement d'unité nationale en 1969. On assiste alors à la création et à la montée du Mouvement Militant Mauricien (MMM) formé en 1969 par de jeunes universitaires, dont Paul Bérenger. Le Mouvement Militant Mauricien prendra aux partis traditionnels de larges tranches de leur électorat, organise les syndicats, déclenche des grèves menant à l'état d'urgences en 1971. Le parti de M. Bérenger et de M. Anerood Jugnauth passe de très peu à côté du pouvoir en 1976, mais il est évident que le régime travailliste s'affaiblit et en 1982, il est balayé (60 sièges à 0) aux élections générales qui voient l'arrivée au pouvoir d'un Mouvement Militant Mauricien toutefois assagi et plus modéré.

La rupture

Un conflit opposant Sir Anerood Jugnauth à Paul Bérenger en 1983 provoque l'éclatement du gouvernement Mouvement Militant Mauricien. Sir Anerood Jugnauth reste au Gouvernement à la faveur d'un accord électoral avec le Parti Travailliste et le Parti Mauricien Social Démocrate. Sir Seewoosagur Ramgoolam devient Gouverneur Général du pays et Sir Gaëtan Duval Vice Premier Ministre. Bérenger et le Mouvement Militant Mauricien repassent dans l'Opposition. S'ensuit alors une longue période de forte prospérité économique. L'Ile Maurice se hisse au rang des pays nouvellement industrialisés. L'île accueille de nombreux investisseurs étrangers, dans ses zones industrielles, le chômage (qui avait atteint 20% est résorbé, le Produit National Brut par tête d'habitant est décuplé. Maurice devient quelques années plus tard une République au sein du Commonwealth, avec un Président à sa tête. De nouveaux secteurs économiques (offshore banking, zone franche, zone de services, tourisme) sont favorisés. Le pays est présenté par la Banque Mondiale comme un exemple économique à suivre. En décembre 1995, après une certaine usure du pouvoir, Sir Anerood Jugnauth est battu aux élections générales après douze ans de pouvoir. Une nouvelle coalition regroupant cette fois le Parti Travailliste (animé par le Dr Navin Ramgoolam, fils de Sir Seewoogur) et le Mouvement Militant Mauricien de Paul Bérenger prend le pouvoir. Toutefois cette coalition se brouille en juin 1996. Paul Bérenger est révoqué du gouvernement. Tous ses ministres le suivent dans l'opposition. Depuis, le Parti Travailliste gouverne seul le pays. Le Mouvement Militant Mauricien est repassé dans l'opposition, où il a rejoint le Mouvement Socialiste Mauricien de Sir Anerood Jugnauth.

L'Ile Maurice fêta le 12 mars 1998 le 30ème anniversaire de son indépendance; une expérience dont chacun s'accorde à dire qu'elle a été un retentissant succès.

1968 : L'INDEPENDANCE

Le contexte de l'indépendance : un climat de lourdes appréhensions.

Instabilité politique.
Tensions communales.
Difficultés économiques.
Chômage insoutenable.
Psychose de l'émigration.

Mais également une forte volonté de réussir un parti historique.

L'Ile Maurice accède, le 12 mars 1968 à l'indépendance dans un climat de lourdes appréhensions. Sur à peu près tous les plans, politique, social, économique, la situation est difficile et incertaine et chacun s'interroge sur les perspectives d'avenir dans l'île.

Sur le plan politique, les années 1963-67 ont vu apparaître une dangereuse bipolarisation. Le Parti Travailliste, largement majoritaire aux élections générales de 1948 et 1953 dans le pays, et alors véritablement national dans la composition de son électorat, a vu son influence diminuer et la nature de son soutien changer. Il doit, aux élections de 1967, faire alliance avec le Comité d'Action Musulman de Razack Mohamed et avec l'Independent Forward Block de Sookdeo Bissoondoyal, pour espérer dépasser la barre des 50% des suffrages en faveur de l'indépendance. Le Parti Travailliste en 1968 a, en effet, perdu, au profit du Parti Mauricien, une très large fraction de son électorat de la population générale et domine surtout les régions rurales, puisant sa force dans l'électorat hindou. Seuls Guy Forget, Harold Walter, Raymond Rault, Michael Leal, Guy Balancy, Régis Chaperon et quelques autres lui apportent une certaine caution, bien que très faible, de la population générale. Son alliance avec le Comité d'Action Musulman lui permet de présenter une image tant soit peu nationale, mais le Comité d'Action Musulman a lui-même perdu plusieurs sièges au profit du Parti Mauricien Social Démocrate. Quelques mois avant l'indépendance, aux élections de 1967, le leader du Comité d'Action Musulman, Mohamed, avait été lui-même battu aux élections à la Plaine Verte par les candidats du Parti Mauricien Social Démocrate, notamment Ebrahim Dawood, et n'avait pu entrer au Parlement que comme best-looser. Avec d'autres jeunes musulmans, notamment Monaf Fakira et Elias Oozeerally, le Parti Mauricien Social Démocrate contrôle donc en 1968 une large part de cet électorat. Avec Jean Ah-Chuen dans la population sino-mauricienne et Tangavel Narainen et un parti 'Tamil United Party' allié au Parti Mauricien Social Démocrate, le parti ratisse large en 1968 et fait le plein dans plusieurs groupes sociaux. Pour le Parti Travailliste, parti de Rozemont et d'Anquetil, de Seeneevassen et de Ramgoolam, c'est là une évolution dramatique que le parti ne pourra jamais véritablement renverser. De ce fait, dans le subconscient des minorités l'indépendance sera perçue surtout comme la perspective de la domination d'un seul groupe ethnique sur les autres. Même dans l'électorat rural, le Parti Travailliste ne contrôle pas entièrement la loyauté de tous les électeurs. Au fil des années, l'Independant Forward Block de Sookdeo Bissoondoyal, Gangaram, Jeetah et Anerood Jugnauth, particulièrement dans le sud de l'Ile, lui a toujours disputé une suprématie absolue et si Sookdeo Bissoondoyal est entièrement en faveur de l'indépendance, il n'en est pas moins souvent hostile à Sir Seewoosagur Ramgoolam et il le montrera bien, quand refusant la coalition Parti Travailliste– Parti Mauricien Social Démocrate en 1969, et renvoyé du gouvernement, il repassera dans l'Opposition. Quant au Parti Mauricien, enfin, devenu Parti Mauricien Social Démocrate sur l'insistance de Gaëtan Duval, il s'est considérablement renforcé entre 1963 et 1968. Ceci est largement dû à des influences systématiquement employées, à des sentiments profonds d'insécurité dans la population générale renforcés par les incidents de Trois Boutiques en 1965, mais surtout grâce au chef de partie Gaëtan Duval. Celui-ci jeune député de Curepipe, avocat de 38 ans, a succédé à Jules Koenig à la direction du parti et fait figure (et adopte le style) du roi politique des minorités, à la faveur d'un culte de la personnalité sans doute encore jamais vu à Maurice. Aux élections de 1967, le Parti Mauricien Social Démocrate a balayé les sièges dans les villes, a fait voter 44% des mauriciens contre l'indépendance et a, subséquemment, gardé mobilisé cet électorat qui, déjà, émigre en masse vers l'Europe, L'Afrique du Sud et l'Australie. Les Travaillistes ont donc, en face d'eux au moment de l'indépendance un formidable appareil d'opposition systématique qui contrôle tous les conseils urbains et qui est puissamment soutenu par les employeurs mauriciens. La marge de manœuvre politique du Premier Ministre, Sir Seewoosagur Ramgoolamen cette année 1968, est donc très étroite.

Au moment de l'indépendance, Sir Seewoosagur Ramgoolam tente surtout d'apaiser les craintes de domination hindoue chez les minorités et tentera souvent de mettre le Parti Mauricien Social Démocrate dans le coup en lui demandant d'accepter le fait de l'indépendance et de conclure avec lui un accord pour un gouvernement de coalition, mais sans succès. Sir Seewoosagur Ramgoolam pourtant n'abandonne pas ; il compte outre-mer de puissants soutiens politiques, d'abord au Parti Travailliste britannique au pouvoir à Londres en 1968, mais aussi en France ou le Général de Gaulle l'aidera, par Michel Debré interposé, à ramollir l'opposition du Parti Mauricien Social Démocrate à une coalition, et à faire adhérer Maurice au Marché Commun comme membre associé (au grand dam du Parti Mauricien Social Démocrate) qui en avait fait sa plateforme electorale. En Inde, en Chine, aux Nations Unies, à Washington, Sir Seewoosagur Ramgoolam a des amitiés influentes qu'il fait jouer pour apaiser les rancoeurs et consolider son régime.


Hostilité et méfiance

Sur le plan social, les hostilités politiques alimentent un communalisme effréné et l'atmosphère est dangereusement différente de ce qu'elle est aujourd'hui à Maurice. A la méfiance opposant une population de religion chrétienne et les hindous, se sont ajoutés trois mois plus tôt des bagarres raciales traumatisantes entre créoles et musulmans à Port Louis, faisant une quarantaine de morts, des centaines de sans-abri, et fermant littéralement Port Louis pendant plusieurs jours.

Au moment où Maurice accède à l'indépendance, des centaines de soldats anglais assurent l'ordre et la paix, mais à force de patients efforts et d'appels au calme des autorités religieuses, le calme revient peu à peu dans la capitale. Les autres régions ont été heureusement épargnées par ces conflits. Mais le climat social reste pesant.

L'émigration

Des centaines de familles émigrent en 1968 à l'étranger et l'émigration est un sujet de conversation qui divise bien des familles dont les membres souvent se coupent en deux avec le choix de partir ou l'acte de foi de rester et de laisser venir.

L'économie également ne va pas très fort, Maurice dépend alors massivement du sucre, qui représente 90% des exportations et emploie la moitié de la main d'œuvre, et chaque cyclone renvoie le pays dix ans en arrière.

On note des débuts timides d'industrialisation, mais surtout dans le domaine de la substitution à l'importation et non encore pour l'exportation. Les nouveaux produits manufacturés à Maurice doivent faire face à des préjugés tenaces en faveur de produits importés. La diversification agricole obtient pourtant de bons résultats. On tend vers l'autosuffisance et l'Agricultural Marketing Board fait de son mieux. La pêche laisse voir son potentiel, surtout dans les îles. Le thé est porteur de bien des espoirs (qui seront, au fil des ans, déçus), mais le sentiment général est qu'il y a, à Maurice, en mars 1968, un potentiel qu ne demande qu'à se développer.

Le chômage

Le chômage, néanmoins, fait rage. Il y a quelque 20% de chômage, faisant peser sur le gouvernement des pressions insoutenables que le régime de Sir Seewoosagur Ramgoolam tente d'alléger en créant des emplois dans le ‘relief work', quatre jours par semaine, au lieu de stimuler le secteur production. Ce programme d'emplois artificiels sera un désastre financier et social, installant dans la population des habitudes de paresse et d'inutilité qui prendront longtemps à disparaître.

Maurice, en 1968, est classée parmi les nations faiblement développées. Le Produit National Brut (PNB) n'est que de 840 millions de roupies soit 1086 roupies par tête d'habitant. Ce dernier chiffre est lui-même en baisse (il était de 1283 roupies en 1963, cinq ans plus tôt). La balance de paiements est déficitaire, de même que la balance commerciale, Maurice, en effet, importe en 1968 pour la première fois plus de 400 millions de roupies de marchandises notamment de la Grande Bretagne (100 millions de roupies), du riz de Birmanie (42 millions de roupies), de France (24 millions de roupies), d'Allemagne (28 millions de roupies), d'Australie (25 millions de roupies). Les exportations sont, l'année de l'indépendance, de 354 millions de roupies, composées de sucre, avec la Grande Bretagne absorbant 272 millions de roupies à elle seule, mais aussi le Canada (44 millions de roupies), les Etats Unis (21 millions de roupies).

Le déficit commercial de 67 millions de roupies, survenant après un autre déficit de 64 millions de roupies en 1967 est jugé « énorme » et inquiète profondément.

L'inflation est forte et l'indice du coût de la vie est passé de 106,6 en 1967 à 114,1 en 1968. Les taux de change sont alors beaucoup plus stables qu'aujourd'hui. La livre sterling coûte 13 roupies 40 (aujourd'hui 44 roupies 92), le dollar australien 6 roupies 27 (2003: 17 roupies 98), le Franc français 1 roupie 15 (aujourd'hui passé l'Euro 31 roupies 83), le dollar américain 5 roupies 60 (aujourd'hui 27 roupies 87), le rand sud-africain 7 roupies 83, (aujourd'hui 3 roupies 73), le dollar de Hong Kong à 92 cents (aujourd'hui 3 roupies 59) et le deutsche mark 1 roupie 40 (aujourd'hui passé à l'Euro 31 roupies 83).

Données Démographiques

La population mauricienne, au moment de l'indépendance, en 1968 est de 794746 âmes, ainsi répartis : Hindous 412982, population créole : 225478, Musulmans : 131257 et Sino-Mauricien : 25029. Elle augmente de 12700 âmes par an, avec un des taux de progression démographique les plus forts de la planète malgré de gros efforts dans le domaine de la planification familiale. 56,7% de la population est âgée de moins de 21 ans (soit 446500 personnes). L'émigration fait rage : 4500 personnes quittent Maurice en 1968, principalement vers l'Europe et l'Australie, après 3600 autres l'année précédente.

Le chômage fait également rage. Les statistiques officielles de l'emploi font apparaître 16600 chômeurs en mars 1967 mais ce chiffre est jugé totalement artificiel, car le gouvernement emploie déjà 17700 travailleurs suppléants quatres jours par semaine, ce systéme d'assistance fut dénommé "Quatre jours à Paris", sous entendant une forme de travail fictif. Ces travailleurs de relève sont passés de 5000 en 1965 à 17000 trois ans après.

Au total 106000 Mauriciens ont des emplois : 56431 dans l'agriculture, 28000 dans le gouvernement et les municipalités 7600 dans l'industrie. Le salaire moyen est de 7 roupies par jour. Un boulanger touche 6 roupies 75 par jour, un charpentier 8 roupies, un maçon 8 roupies, un mécanicien 11 roupies 50 , un électricien 7 roupies 20, un receveur d'autobus 8 roupies 25 et un laboureur 6 roupies. Le salarié de l'industrie sucrière touche lui, 149 roupies par mois.

Le gouvernement poursuit, malgré tout, sa politique d'aide aux désavantagés. Il verse à 41000 Mauriciens une pension de vieillesse, au coût de 11 millions de roupies par an. L'allocation familiale absorbe 8 millions de roupies pour 40000 familles.

L'Education

Au chapitre de l'éducation, on relève 332 écoles primaires avec 142900 élèves et 4200 enseignants et 137 collèges secondaires avec 40000 étudiants. On constate un déséquilibre avec deux fois plus de garçons que de filles à l'école. L'éducation, en ce temps, est payante, 10 roupies pour la forme 1 et 25 roupies pour la Senior et la HSC.

Le développement

10000 voitures sont sur nos routes, 2600 mobylettes, 1900 motocyclettes, 650 autobus et 2400 camions. Maurice est un centre important de trafic maritime avec 1270 arrivées de navires, davantage qu'aujourd'hui. 550 avions atterrissent à Plaisance chaque année déversant 29000 passagers et 16000 touristes.

16000 familles sont les heureuses utilisatrices du téléphone et 12000 familles ont la télévision en noir et blanc, quatre fois plus qu'en 1965. C'est le temps où on partageait sa télé avec ses voisins.

Le budget courant de l'Etat est de 230 millions de roupies, le budget annuel de développement de 60 millions de roupies. Le déficit budgétaire, jugé scandaleux par l'opposition est de 4,6 millions de roupies.

La taxe (impôts), contre laquelle tout le monde s'insurge puisque le plafond est de 70%, rapporte 26 millions de roupies de la part des particuliers et 18 millions des compagnies. L'impôt sur le jeu rapporte 2 millions de roupies, la poste génère 4,2 millions de revenus. Le gouvernement britannique, en cette année 1968, accorde généreusement à Maurice 18,4 millions de roupies pour renflouer son budget. Le gouvernement dépense 1,6 millions pour le logement, 29 millions pour l'éducation, 8 millions pour les routes et 90 millions pour les budgets d'aides sociale. Rodrigues a droit à la bagatelle de 3 millions de roupies. La dette publique est de 300 millions de roupies. La Banque de Maurice nouvellement crée s'enorgueillit d'avoir des actifs de 302 millions. Les liquidités en circulation dans le pays ne sont que de 89 millions de roupies.
Enfin, on annonce un "démmarrage industriel spectaculaire", avec des investissements de 73 millions pour 45 usines.

Chronologie historique

1500 Découverte de l'Ile par les Portugais qui la nomment Ile du cygne (Ilha do Cime).
1598 Prise de l'Ile par les Hollandais qui la rebaptisent Mauritius (du nom de leur prince Maurice de Nassau).
1638 Arrivée des colons hollandais.
1639 Introduction de la canne à sucre.
1710 Les hollandais abandonnent l'Ile.
1715 Les français annexent l'Ile et la rebaptisent Isle de France.
1719 Louis XV cède l'île à la Compagnie des Indes.
1721 Arrivée des colons français.
1735 Début de l'administration de Mahé de la Bourdonnais qui développe l'activité commerciale maritime de l'Ile Maurice, création de Port Louis.
1744 L'Isle de France devient célèbre à cause du naufrage du Saint Géran, qui transportait Virginie, dans la baie du tombeau. L'histoire de Paul et Virginie a été immortalisée par Bernardin de Saint Pierre.
1747 Mahé de la Bourdonnais doit quitter l'île.
1756 Arrivée des premiers corsaires, dont le célèbre malouin Robert Surcouf.
1764 Faillite de la Compagnie des Indes, Louis XV rachète L'île.
1767 Arrivée des premiers administrateurs royaux tel que l'intendant Pierre Poivre qui tente d'acclimater les épices, c'est un échec.
1810 Les anglais prennent l'île qu'ils rebaptisent Mauritius.
1835 Abolition de l'esclavage, les esclaves sont remplacés par des indiens qui travaillent pour un salaire de misère.
1967 Les mauriciens votent en faveur de l'indépendance.
1968 Proclamation de l'indépendance le 12 mars, l'île Maurice entre dans le Commonwealth britanique, Seewoosagur Ramgoolan devient premier ministre.
1992 Le 12 mars, l'île Maurice devient une république indépendante.


Hymne national de l'Ile Maurice


Glory to thee
Motherland, O Motherland of mine.
Sweet is thy as beauty
Sweet is thy as fragrance
Around thee we gather.
As one people,
As one nation
In peace, justice, and liberty
Beloved country,
May God bless thee
For ever and ever

 

SIRANDANES

Métaphores allégoriques, jeux de mots et devinettes populaires en usage dans le peuple créole mauricien.


Dilo diboute ? (pied cane)
De l'eau qui se tient debout . La canne à sucre

Lapeau mort condir vivant ? (soulier)
Une peau morte qui conduit une peau vivante. Les chaussures

Canif pendant ? (tamarin)
Canif suspendu. Le tamarin

Ti bonome grand sapo ? (sampignon)
Petit homme avec un grand chapeau. Le champignon

Dilo pendant ? (coco)
De l'eau suspendue. La noix de coco

Piti bat mama ? (la closs)
Le petit frappe sa mère. La cloche

Coutiou coutiou dans coin laporte ? (balié)
Des murmures derrière la porte. Le balai

Mo alonze li li alonze moi ? (natte)
Je m'allonge, il m'allonge. Le tapis

Manze par ventre rane par ledos ? (rabot)
Manger par le ventre et sortir par le dos. Le rabot

Casse cerceuil manze dimoune mort ? (pistas)
Brise le cercueil et manger le mort. Cacahuètes

Boule disang enbas laterre ? (betterave)
Boule de sang sous la terre. La betterave roug e

Ki ser mo mama pas mo matante ? (ceinture)
Qui est la sœur de ma maman mais qui n'est pas ma tante. La ceinture
(sœur se prononce serre en créole)

Li manze touzours zamais li avalé ? (moulin cannes)
Il mange tout le temps mais n'avale jamais. Une sucrerie

Dix bonome latet blanc ? (zong)
Petit homme à la tête blanche. Les ongles

Ene barik dé kalité dilo ? (dizef)
Une barrique avec deux couleurs d'eau. Un œuf

Kan gran mama noir santé, tou so piti blan dansé? (Marmit duri lao difé)
Quand la grand mère chante, son petit blanc danse. Marmite de riz sur le feu

Mo touffe li, li touffe moi? (douler)
Je l'étouffe, il m'étouffe. La douleur


Coupe mo vente pou gagne mo trézor? (Grenade)
Coupe mon ventre tu auras mon trésor. La Grenade

Gran zoreille, ti lizié, lapo verni? (Soursouri)
Grandes oreilles, petits yeux, et peau vernie. Chauve souris

Pavé lao, pavé amba ? (Torti)
Pavé en haut et en bas. Tortue

Mo guette li, li guette moi ? (Laglas)
Je le regarde, il me regarde. Le Mirroir

Mo mousoir dan dilo, napa mouyé? (bred songe)
Mon mouchoir dans l ‘eau ne se mouille pas. Feuille de brède Songe

Mo envoy ene dimoune la boutik, li pa retourné? (Koudeross)
J'envoie quelqu'un à la boutique, mais il ne revient pas. Un jet de caillou

Mo bonnfam akot li passé, laisse so lakras? (Courpa)
Ma femme laisse son crachat partout ou elle passe. L'escargot

Mo marsé, li marsé. Mo arrété, li arrété? (Mo lombraz)
Je marche, il marche, je m'arrête, il s'arrête. Mon ombre

Mo marsé, li marsé. Mo arrété, li marsé mème? (Mo monte)
Je marche, il marche, je m'arrête, il continue à marcher. Ma montre

Guel dans guel, huit pat, quat zoreils ? (Li chien manze dans marmite)
Gueule dans gueule, huit pattes, quatres oreilles. Un chien qui mange dans une marmite

Aswar, mo truv en bann lagrin dan mo laplen. Ler mo lévé mo napli truv zot ? (Zétwal)
Le soir, je vois des graines dans ma plaine, à mon réveille, je ne les vois plus. Les étoiles

Ki ti bouir premyer marmit dan pey Moris ? (Difé)
Qui a fait bouillir la première marmite à l'île Maurice. Le feu

Li amen moi cote mo envi, mé li rest en place ? (Lari)
Elle m'emmène où je veux, mais elle ne bouge pas. La rue

Qui sin fer létour maurice ? (5 sous)
Quel saint fait le tour de Maurice. 5 sous

 

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